N° 22 - octobre 2012 : « Fabrication et usage des EcoQuartiers Français »
 

Le mot du bureau

Le mot du bureau

« Bonjour,

En attendant la visite de la ZAC de l’Union à Roubaix-Tourcoing-Wattrelos, dans le cadre des Assises de l’Union le vendredi 19 octobre 2012 (je vous invite à rapidement vous inscrire si cela n’est pas déjà fait), voilà la lettre d’information EcoQuartier d’Octobre.
Vous y trouverez un résumé de la Thèse de Vincent Renauld, qui a observé les difficultés du passage au réel dans des EcoQuartiers Français. La question de l’usage est fondamentale, et c’est elle qui détermine la réussite d’un EcoQuartier. L’objectif est en effet que les nouveaux habitants, qu’ils aient choisi ou non de venir vivre dans l’EcoQuartier, s’approprient facilement les innovations techniques, modifient leur comportement voire changent de mode de consommation. Mais Vincent Renauld a observé que les performances annoncées par les fabricants des EcoQuartiers sont trop souvent basées sur le présupposé d’un usage normal, voire normé (température à 19°C, un seul véhicule par ménage…). Parler d’usage « normal », n’est-ce pas contradictoire avec l’idée même de perpétuelle adaptation de l’EcoQuartier avec son milieu et donc ses habitants ? La thèse de Vincent Renauld est un excellent travail qui mesure l’écart entre conception et usage.
Vous trouverez aussi des annonces sur des démarches à suivre que ce soit le lancement de l’appel à candidature pour les EcoGestes des EcoMaires, sur la suite des Scot-Grenelle et un appel à projet de l’ADEME et de la Région Nord Pas-de-Calais sur la lutte contre le changement climatique, signe que les EcoQuartiers sont des actions qui s’inscrivent dans un mouvement plus global.

Bonne lecture ! »

Franck Faucheux
Bureau AD4 - DGALN

Point sur

« Fabrication et usage des EcoQuartiers français »

Résumé de la thèse de Vincent Renauld encadrée par le laboratoire de recherche ITUS/EVS, soutenue le 28 juin 2012 devant l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon et présentée au Comité Scientifique du 13 septembre 2012.

Contrairement aux communautés écologiques pionnières et militantes des années 70/90 et aux premiers EcoQuartiers nord-européens des années 90, opérations souvent emblématiques participant à de grands événements comme les expositions universelles (Hannovre), les EcoQuartiers français depuis le début des années 2000 relèvent davantage d’une modification progressive de l’aménagement ordinaire pour aller vers la ville durable. A ce titre, ils consistent à généraliser de nouveaux aménagements (espaces verts rustiques, voiries douces, etc.) et de nouvelles constructions (isolation par l’extérieur, ventilation double-flux, sols écologiques, etc.) en adéquation avec les principes de durabilité. Cette tentative de généralisation de techniques innovantes au sein de la fabrication urbaine française s’accompagne alors d’une myriade de dispositifs éducatifs à destination des travailleurs du projet et futurs habitants du quartier. Ces outils consistent à inculquer aux différents publics ciblés les nouveaux savoir-faire et savoir-vivre nécessaires à la mise en œuvre et au fonctionnement des techniques écologiques. Autrement dit, ces outils définissent le « bon usage » d’un EcoQuartier et visent à rapprocher les pratiques sociales réelles des habitants de celles escomptées par les acteurs qui fabriquent les EcoQuartiers.

Dans la vie quotidienne des usagers, le projet social est contrarié par le face-à-face entre innovations techniques et habitants qui tourne au duel. En effet, ces derniers contournent et bricolent les nouveautés techniques en raison du problème qu’elles posent pour habiter. Ce problème s’explique par les ruptures entre innovations techniques et usages sociaux. Elles montrent que le savoir-habiter des habitants se prolonge mal dans les objets écologiques contemporains.

Pour conclure, cette situation de production des EcoQuartiers français du début des années 2000 rappelle tout particulièrement celle des grands ensembles des années 50/70. Elle reproduit au nom de la durabilité ce que les grands ensembles imaginaient au nom de la modernité : un projet social abstrait, qui ne vise pas à s’ajuster aux usages sociaux mais à les subvertir afin de renouveler une offre en nouveautés techniques exigée par le système économique actuel de production. En ce sens, la thèse pose en ouverture la question de savoir si la promesse actuelle de « l’homme durable » dans les EcoQuartiers ne succède pas à celle de « l’homme moderne » des grands ensembles. A moins que l’on intègre davantage les usages sociaux dans le mode de programmation, de conception et d’évaluation des EcoQuartiers.

Témoignage

Vincent Renauld (Ingénieur)

Quels sont les principaux enseignements retirés de votre analyse des EcoQuartiers et de leur éco-techniques en termes d’usage ?

Tout d’abord, les éco-techniques sont particulièrement subversives socialement. Elles exigent une modification radicale des habitudes sociales, que ce soit chez les ouvriers, techniciens ou habitants. Autrement dit, elles attendent des usagers qu’ils ne se comportent plus selon leurs usages, mais selon les règles de fonctionnement technique des innovations.
Ensuite, dans la majorité des EcoQuartiers français, j’ai pu constater que cette subversion des usages ne vient pas servir un projet politiquement émancipateur ou progressiste, mais particulièrement conservateur. La projection des rapports hommes/femmes est semblable à l’usage, la famille nucléaire est dominante, et la dimension dissidente ou politique de l’usager est occultée. Pour l’habitant imaginé, il s’agit de travailler, se divertir, et de consommer comme d’habitude. Ainsi, pour reprendre le vocable de Paul Ricœur, la durabilité n’est pas une utopie qui vise à faire advenir un monde politiquement nouveau, mais une idéologie qui légitime les rapports de domination économiques et sociaux dans notre société.

Que pensez-vous de l’émergence de la pédagogie en comportements sociaux dans les EcoQuartiers ?

Faire appel à des pédagogues en comportements sociaux dans les EcoQuartiers est le moyen utilisé par les acteurs économiques pour résoudre le problème que posent les usages à la fabrication des éco-techniques. Autrement dit, plus les dispositifs éducatifs sont importants, plus l’habitant pose problème aux acteurs de la fabrication. Ils sont ainsi pour l’habitant ce que la publicité est au consommateur : un instrument socialement normatif, qui par l’idéologie, répond stratégiquement à des exigences économiques de production.

Les comportements sociaux dans les EcoQuartiers seraient-ils donc modifiés selon des exigences économiques ?

Absolument, ce ne sont d’ailleurs pas les usages économiques des acteurs qui posent problème, mais bien les usages sociaux des habitants ! J’ai d’ailleurs démontré dans ma thèse que la production des éco-techniques conservait entièrement les modèles d’affaires des aménageurs, promoteurs, ou encore des bailleurs sociaux, c’est-à-dire au final leurs intérêts économiques. En fait, la production des éco-techniques actuelle s’inscrit dans la continuité de celles des innovations modernes des années 50/70 (voitures, électroménagers, etc.). Elle vise à fabriquer de la croissance en se décalant des usages et en surmontant la saturation des besoins. En ce sens, elle tend à reproduire et conserver notre mode d’organisation économique actuellement dominant.

Vincent Renauld
Ingénieur

Brèves

<U> Focus sur </U> : Le concours des « Ecogestes » des Ecomaires


Le concours des Trophées Eco Actions permet de récompenser les collectivités locales les plus innovantes en matière de développement. Chaque année, depuis 23 ans, une centaine de dossiers sont déposés et étudiés par les membres du jury : maires, présidents d’association ou de fédération, partenaires de l’association, représentants d’institutions telles que le Ministère de l’Environnement et du développement durable, l’ADEME et l’UNESCO.
Ce cadre à la fois espace politique national et lieu fécond en dynamiques locales, renforce les liens entre les collectivités territoriales participantes où plusieurs prix de reconnaissance sont attribués. Les prix seront remis à l’Assemblée nationale sous le Haut patronage du Président de l’Assemblée nationale le 11 décembre 2012 et une cérémonie locale aura lieu dans chaque ville ayant reçu un prix.
Calendrier prévisionnel : Date limite de candidature : 27 octobre 2012. Délibération du jury : novembre 2012.
Consulter le site des trophées Eco Actions.

<U> Retour sur</U> : La journée « SCOT-Grenelle »


L’activité économique et commerciale façonne l’organisation spatiale des territoires. L’intégration du commerce dans les documents de planification est un sujet récurent et difficile : il ne faut ni figer l’évolution de ces activités, ni entraver la liberté d’établissement et la libre concurrence.
La loi ENE a remodelé la composition du SCoT en rendant obligatoire l’élaboration d’un document d’aménagement commercial (DAC). Mais la législation actuelle n’est pas encore satisfaisante pour intégrer l’aménagement commercial dans un projet global d’aménagement à vocation stratégique. Comment faire en sorte qu’à travers les SCoT, ce soient de véritables projets d’aménagement commercial qui soient élaborés, des projets de qualités urbaine et architecturale exemplaires sur le plan de l’environnement et de l’aménagement durable ?
Associations d’élus, représentants de la grande distribution et de la CCI ont pu au cours de cette journée - organisée le 28 septembre 2012, au METL - s’exprimer à ce sujet. Des établissements publics en train d’élaborer des SCoT ont présenté l’état de leur projet. De nombreuses contributions devraient permettre d’améliorer la réglementation et les pratiques.

<U> Focus sur </U> : L’appel à projets ADEME - CR Nord-Pas-de-Calais

L’appel à projets porté par l’ADEME et le Conseil régional Nord-Pas-de- Calais vise à soutenir des projets de recherche appliqués à un territoire d’expérimentation prioritairement dans les domaines de l’habitat, de l’urbanisme et des réseaux énergétiques. La finalité des projets étant une réduction des émissions de gaz à effet de serre et une adaptation des systèmes urbains au changement climatique. Il vise également à soutenir des projets de recherche-action pour accompagner, en partenariat des maîtres d’ouvrage dans l’analyse et/ou la mise en oeuvre de leurs projets de ville durable.
Cet appel à projets cible en premier lieu les établissements publics et privés de recherche, associés à un ou des partenaire(s) situé(s) en Nord-Pas-de-Calais de type collectivité, entreprise, bailleur, agence d’urbanisme, etc. Ces derniers sont aussi éligibles, à condition qu’ils s’inscrivent dans un projet de recherche et qu’ils s’associent à une équipe de recherche.
Dates impératives de dépôt des candidatures : Vendredi 19 octobre 2012 pour les lettres d’intention et Mardi 15 janvier 2013 pour les dossiers de candidature dans leur forme définitive.
En savoir plus (format pdf - 234.9 ko - 08/10/2012) .

Agenda

Agenda du Club

  • Conférence-visite de Roubaix-Tourcoing-Wattrelos, Imaginarium « Plaine Images » sur le site de l’Union, 19 octobre.
  • Les Assises de l’Union, Imaginarium « Plaine Images » sur le site de l’Union, 20 octobre.

Agenda national

  • 4ème forum national des quartiers durables, les 17 et 18 octobre 2012 à Saint-Ouen.
  • Colloque « Quel droit pour un urbanisme durable », le 15 novembre 2012 à l’Université de Caen. Programme et inscription ici.
  • 9ème édition du Salon Habitat Durable & Energies Renouvelables, du 8 au 11 novembre 2012 à Nantes. Consulter le site officiel du salon.