N° 28 - avril 2013 : « La Ville Hybride : mettre l’homme au cœur des projets d’aménagement »
 

Le mot du bureau

Le mot du bureau

« Bonjour,

Le bureau AD4 sillonne la France pour vous présenter le Label EcoQuartier et dans le même temps, soixante deux de vos projets, les plus avancés, ont fait l’objet d’un travail collectif de mise à jour des données avec les correspondants Ville durable en DDT et DREALs et vos équipes. Ces rencontres montrent l’avancée des projets qui deviennent réalité mais aussi la difficulté de maintenir les objectifs au fur et mesure qu’arrivent des nouveaux acteurs. La vision des élus se retrouve t-elle dans les cahiers des charges des constructeurs? Et au-delà, les projets sont livrés à l’appropriation voire la confrontation avec les usagers ? D’ailleurs, comment les appeler : usagers ? Habitants ? Oserions-nous parler de clientèle ou de citoyens ? Le retour d’expérience de Mickaël SILLY dans cette lettre pourra vous éclairer, j’en suis sûr, sur l’ouverture nécessaire des projets d’EcoQuartier à ces « experts d’usage ».
A l’heure où le Ministère se met en situation de proposer les premiers labels EcoQuartier à la Ministre, se pose de façon plus ostentatoire la question du message que ce panel va envoyer. Comment le label peut-il valoriser une opération dont les choix de densité, de stationnement, de limitation de la circulation automobile ne répondent pas entièrement aux conclusions de la concertation locale, dont la demande est celle de la maison individuelle ? Comment labelliser une opération qui était innovante il y a encore quelques années et qui aujourd’hui ne répond pas à des thèmes (moins techniques, plus urbains) qui ont émergé entre temps ? Comment accepter les différences de performance des réponses sans déroger aux valeurs non négociables de l’EcoQuartier : la gouvernance ouverte (portage politique / place des habitants / qualité du pilotage professionnel), mixité (sociale, fonctionnelle, intergénérationnelle), le choix de la densité et la transition écologique ? Comment garder au label un esprit d’amélioration perpétuelle voire d’innovation (à l’image du colloque "fondaterra" abordé dans cette lettre) sans tomber dans l’élitisme ? Comment financer son projet en temps de crise ? Cette dernière question, récurrente dans le club national, nous a incités à mettre au point un tableur excel d’aide au montage et au suivi financier du projet.
Autant de questions qui se rapportent à l’expertise, nécessairement pluridisciplinaire et partagée mise en place par le ministère. Les premiers Labels seront l’occasion d’afficher les premières réponses.

Bonne lecture ! »

Franck Faucheux
Bureau AD4 - DGALN

Point sur

« VHYB, la Ville Hybride : mettre l’homme - son histoire, sa culture - au cœur des projets d’aménagement »

Le préalable : retisser le lien avec les gens

Tout projet d’aménagement et plus encore d’éco-quartier a pour finalité ultime de faire « société ». Tisser des liens avec les gens de manière sensible, affective sans tomber dans le pathos constitue un préalable indispensable à toute démarche rationnelle, scientifique. Cela permet d’éviter d’enfermer le projet dans des objectifs purement techniques et quantitatifs, voire qualitatifs quand ils ne traitent que des aspects environnementaux. Cela peut être associé à de la concertation, mais à une concertation dont le but ne serait pas de la recherche d’adhésion en aval des projets, mais à une concertation qui cherche d’abord à établir le lien, à comprendre comment les habitants, les usagers (d’ici et d’ailleurs) vivent, utilisent, perçoivent le territoire. Les formes de cette concertation, la façon dont elle doit être subtilement amenée, et les acteurs qui les animent sont primordiales. Cela passe par des supports de concertation auxquels on ne pense pas a priori car apparemment sans lien avec l‘objectif. Les territoires en regorgent généralement dans les milieux associatifs, culturels, mais on ne les voit pas. Et pourtant ils sont très efficaces. La réinsertion d’animaux d’élevages en zones urbaines denses et précaires est un exemple. Olivier le berger qui vient d’installer une bergerie à l’université de Villetaneuse est d’ailleurs intarissable sur le sujet…

Ne plus faire du temps du chantier un temps subi mais un temps choisi par les habitants, les riverains, les usagers des différents équipements et services, comme lors de la construction de la scène nationale de Calais. Profiter du temps du chantier pour faire de la pédagogie auprès des élèves aux alentours pour leur apprendre dans quels matériaux sera construit les édifices, d’où ils proviennent et comment ils seront acheminés. Faire du temps du chantier un moment de valorisation des cultures locales en réunissant les habitants et en les faisant plancher sur les expressions « cht’i », pour les apposer sur des plaques d’immatriculation qui recouvreront la maison des lettres, pour renforcer l’appropriation des équipements et leur usage responsable. Faire du temps du chantier un moment de convivialité pour permettre aux riverains de s’y réunir, d’établir le lien, en organisant un banquet multi-générationnel ou un concert-buffet de type auberge espagnol lors d’un moment emblématique du chantier (par exemple la pose d’un toit) et pouvoir dire plus tard à ses enfants, petits-enfants « j’y étais ». Faire du temps du chantier un moment de valorisation des ouvriers en organisant par exemple une exposition photographique des « gueules » du chantier, par un photographe local. Faire de la cabane de chantier non un lieu à l’écart des regards, mais un lieu de partage, où l’on aime à se retrouver entre ouvriers, architectes, riverains, enseignants, élèves… Faire du temps du chantier non un temps perdu mais un temps gagné sur l’appropriation, le maintien responsable et la transformation éventuelle des équipements par les utilisateurs.

Pour en savoir plus : http://vhyblavillehybride.blogspot.fr/

Témoignage

Michaël Silly - Fondateur de « Vhyb la ville hybride », ancien élève du CELSA (Centre d’Etudes Littéraires et Scientifiques Appliquées) et diplômé en sociologie.

Impliquer les habitants avant même le diagnostic peut-il engendrer des déceptions à l’arrivée ?

Il y a plusieurs idées reçues contre lesquelles il faut lutter. La plus récurrente est de croire qu’impliquer les habitants cela signifie leur demander leur avis sur tout, tout le temps. Hors il s’agit davantage d’établir dans un premier temps un lien, une forme d’empathie qui permette de se mettre à la place des habitants, de comprendre comment ils vivent, quels sont leurs difficultés, leurs besoins. Ce rôle ne peut pas être tenu par l’institution publique car elle porte tout le poids de son histoire mais des équipes qui ont une connaissance fine du tissu social et associatif et qui ont une capacité d’immersion totale.

Quelle est dès lors la place des techniciens dans votre démarche ?

L’idée est d’établir un processus itératif avec les techniciens pour leur faire remonter les pratiques existantes en matière de mobilité, d’utilisation de l’espace public, du chauffage… pour leur permettre d’avoir un diagnostic fin en matière d’usages existants, pour ensuite voir comment s’appuyer dessus et sur quels acteurs moteurs s’appuyer pour introduire voire co-concevoir de nouvelles pratiques en matière d’utilisation de l’espace public, de mutualisation des formes de mobilité etc… Il s’agit en somme d’une boucle locale des usages qui se nourrit des remontées d’information, puis de scenarii de la part des techniciens, qui sont à nouveau mis à l’épreuve du niveau d’acceptabilité, de préparation au changement.

Est-ce que cela coûte plus cher ?

L’intérêt d’une boucle locale des usages est qu’elle sensibilise très en amont les habitants et les usagers sur les coûts de l’opération. Une forme de compréhension s’installe alors pour trouver ensemble des solutions viables financièrement pour la collectivité, qui n’est autre…qu’eux. Le projet devenant leur projet, ils finissent par le gérer comme leur propre cordon de la bourse en inventant des solutions moins onéreuses (par exemple en milieu péri-urbain ou rural, en mutualisant l’utilisation d’un parc automobile existant au lieu de créer des lignes de bus).

Brèves

<U> Focus sur</U> : Un outil d’analyse et de pilotage financier d’un EcoQuartier 

L’année 2012 a été l’occasion pour l’équipe AD4 de poursuivre les réflexions sur le modèle économique des EcoQuartiers. Partant des constats réalisés par de nombreux porteurs de projets indiquant que les bilans financiers d’aménagement classiques ne sont pas représentatifs de l’ensemble des engagements et des modalités de financement des EcoQuartiers, un groupe de travail composé du bureau AD4, de collectivités locales et d’aménageurs ont élaboré et testé un outil financier dédié aux EcoQuartiers. Cet outil développé par Green City Ingénierie et Capgemini Consulting, permet de rendre compte de l’ensemble des enjeux financiers des mesures EcoQuartiers en les rattachant aux politiques sectorielles classiques, en évaluant leurs gains et leurs coûts relatifs et en prenant en compte les logiques d’exploitation. Lors de la réalisation des premiers tests de cet outil d’analyse et de pilotage, les porteurs de projet ont fait part d’un manque de ratios leur permettant de nourrir leurs réflexions financières. Le bureau AD4 a donc décidé d’initier en 2013 une bibliothèque de ratios de coûts d’aménagement durable.

Consultez le rapport de présentation (format pdf - 891.3 ko - 15/04/2013) sur le financement des EcoQuartiers.

<U> Retour d’expérience </U> : Test sur l’outil financier auprès d’une opération réalisée en concession d’aménagement par un aménageur

Mme Sophie SCHMITT – Directrice de l’Aménagement de Sodéarif.

Sodéarif réalise des opérations d’aménagement en concession d’aménagement pour le compte de collectivités locales. L’équipe a pu tester l’outil d’analyse et de pilotage financier développé par le Ministère de l’Egalité des Territoires et du Logement. Cet outil présente l’intérêt de produire un tableau de bord financier complémentaire au bilan financier d’aménagement.

Il prend en compte l’ensemble des engagements financiers nécessaires à la réalisation de l’EcoQuartier hors concession d’aménagement : réseau de chaleur, parking public… Il permet aussi d’identifier les gains et les coûts relatifs du développement durable et de clarifier l’origine des déficits d’opération.

Grâce à cet outil, la collectivité et l’aménageur peuvent partager une vision commune de l’économie du projet et fixer au projet des ambitions qui soient économiquement supportables.

<U>Retour sur</U> : Le 19 février 2013, Fondaterra, fondation européenne pour des territoires durables organisait un colloque intitulé « dispositifs d’activation de l’innovation pour la ville durable ». .

Plus de 200 participants se sont réunis à cette occasion afin d’échanger avec les intervenants d’horizons diverses – Fablab (Nod-A), espaces de coworking (La Cantine), les living labs (Fondaterra et son urban living lab) – ainsi qu’avec des acteurs institutionnels (région île-de-France, Caisse des dépôts) ou recherche.

La journée a été rythmée par des échanges sur les stratégies numériques territoriales, la place de l’open data, l’open innovation, la participation citoyenne et la co-création. Des présentations de projets concrets pour la conversion écologique des territoires ont également été proposées. Enfin, car malgré l’encrage local de ce colloque, Fondaterra est bien dans une dynamique et un maillage européen voir international (du local au global), le colloque s’est clôturé avec la signature d’un « Memorandum of Understanding » entre l’European Network of Living Labs (ENoLL) et France Living Labs (F2L) dont Fondaterra est vice-président. Les actes seront disponibles début avril sur le site de Fondaterra."

Agenda

Agenda du Club

  • Réunion interrégionale de présentation du label EcoQuartier :

les 25 et 26 avril à Bordeaux au salon des élus locaux et agents publics d’Aquitaine
le 17 juin à Poitiers

Agenda national