"Le parc locatif privé compte près de 6,5 millions de logements, dont 3,1 millions sont considérés comme des passoires thermiques de classes F et G", affirme le préambule au rapport intitulé Parc privé et rénovation énergétique, publié en octobre 2019 par le Plan Bâtiment Durable (1). "Il est estimé, poursuivait-il, que ce parc résidentiel privé énergivore accueille 1,7 millions de ménages très modestes (les 4 premiers déciles de revenus) qui doivent ainsi faire face à un couple " loyer + charges" important."
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Le groupe de travail co-piloté par Pierre Hautus, directeur général de l’Union Nationale des Propriétaires Immobiliers (UNPI) et Michel Pelenc, directeur général de la Fédération SOLIHA, Solidaires pour l’habitat, a élaboré 10 propositions pour l’éradication des logements énergivores. Parmi celles-ci, figurent la fixation du seuil de consommation énergétique non décente à 330 whep/m2.an ; l’accompagnement des propriétaires bailleurs des 4 premiers déciles et ceux qui conventionnent leur logement pour une rénovation énergétique massive ; l’élargissement des aides de l’Anah vers les propriétaires bailleurs ; l’efficience de l’éco-prêt à taux zéro ; l’extension et le renforcement du dispositif Denormandie ; ou encore l’optimisation des certificats d’économie d’énergie.
Avec la promulgation de la loi Énergie et Climat du 8 novembre 2019, la rénovation énergétique des logements est une priorité réaffirmée du Gouvernement. Elle répond à des enjeux climatiques, de pouvoir d’achat et de qualité de vie, mais également de justice sociale.
Pour ce faire, la loi met en place un plan d’action en trois phases, de 2021 à 2028.
À partir de 2021, les propriétaires de logements "passoires énergétiques" ne pourront plus en augmenter librement le loyer entre deux locations sans les avoir rénovés.
Dès 2022, pour la mise en vente ou la location, les diagnostics de performance énergétique devront être complétés d’un audit énergétique. Lors des transactions, l’acquéreur ou le locataire devra être informé sur ses futures dépenses d’énergies, dans l’annonce immobilière, l’acte de vente ou de location…
En 2023, les logements extrêmement consommateurs d’énergies seront qualifiés de "logement indécents", contraignant les propriétaires à les rénover ou ne plus les louer.
Et, d’ici 2028, les travaux dans les passoires thermiques deviendront obligatoires, avec une mention de cette obligation dans les annonces immobilières des logements concernés dès 2022.
Il est cependant difficile d’avancer sur ce sujet sans prendre en compte le phénomène de la précarité énergétique qui touche environ 6,8 millions de Français (2). Rappelons que, selon la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, " est en situation de précarité énergétique une personne qui éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat ".
C’est dire si la mise en œuvre d’instruments d’aide s’impose pour tenir les engagements et les obligations définis par la loi.
C’est d’ailleurs l’objet du protocole d’accord entre "Régions de France" et l’État pour la mise en place du Service d’accompagnement à la rénovation énergétique (SARE). Ce programme doté de 200 millions d’euros pour la période 2020–2024 se propose de "créer une dynamique territoriale autour de la rénovation en contribuant aux missions d’information, de conseil et d’accompagnement des ménages".
Une initiative d’autant plus importante qu’au-delà des propriétaires bailleurs amenés à s’investir dans la démarche, la rénovation énergétique du parc privé se heurte aux difficultés rencontrées par les propriétaires occupants aux revenus modestes.
Une prime vient désormais les aider. La nouvelle aide à la rénovation énergétique, "MaPrimeRénov’", présentée début janvier 2020, leur est destinée et finance pour partie les travaux. Les montants alloués sont calculés en fonction de deux éléments : les revenus et le gain écologique apporté par les travaux de chauffage, d’isolation ou de ventilation, comme l’indique l’arrêté du 14 janvier 2020.
En rendant les parcours et les aides plus efficaces, la mobilisation des principaux intéressés devrait prendre de l’ampleur, comme le montrent déjà les derniers résultats de l’Anah.
Marc Lemonier
(1) Parc privé et rénovation énergétique, Rapport publié en octobre 2019 par le Plan Bâtiment Durable.
(2) Selon L’Observatoire National de la Précarité Énergétique. https://onpe.org/