Edito

La rénovation énergétique, un outil de la relance économique

Bonjour à toutes et tous,

La crise que nous vivons n’a pas fini de transformer notre quotidien et de bousculer nos repères. Elle peut aussi accélérer les évolutions nécessaires pour répondre aux défis du présent et de demain.

Le plan France Relance s’inscrit d’ores et déjà dans cette perspective, avec la volonté de "bâtir la France de 2030" et de "devenir la première grande économie décarbonée européenne".

Parmi les quatre secteurs prioritaires désignés pour y parvenir, la rénovation énergétique des bâtiments implique une montée en charge sans précédent des opérations. Nous le verrons, la mobilisation concerne les différents segments du parc de logements ou du tertiaire. À côté des moyens financiers, de nouveaux leviers sont actionnés pour accélérer les projets et asseoir l’innovation.

Amélie Renaud, adjointe au directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, au sein du ministère de la Transition écologique, précisera les contours de cet engagement dans le parc social et ses attendus.

Du reste, certains bailleurs sociaux sont déjà prêts. La démarche lancée dans les Pays de la Loire pour réhabiliter des pavillons situés dans des zones périurbaines en témoigne. Elle devrait entraîner de nombreux secteurs d’activité dans son sillage.

Car l’enjeu est de taille, il est écologique, économique et social. Il repose également sur des changements de pratiques. Le prochain numéro de Diagonal, le n° 211, va poursuivre les réflexions entamées. Il explorera les signaux faibles et les tendances fortes qui ressortent de cette situation et qui amèneront, peut-être, à rebattre les cartes de l’urbain.

Virginie Bathellier
Rédactrice en chef de la revue Diagonal
En Diagonal N°7 - Février 2021

A la une

France Relance au service de la rénovation énergétique

Une mobilisation massive de 100 milliards d’euros qui va notamment concerner les bâtiments publics de l’État, le parc privé de logements et l’habitat social.

Crédit photo : Arnaud Bouissou - Terra

Le plan France Relance, en réponse aux conséquences de la crise mondiale de la Covid 19, finance massivement des activités permettant "la refondation économique, sociale et écologique du pays." Les chiffres donnent la mesure de l’effort consenti : 100 milliards d’euros, soit un tiers du budget annuel de l’État, dont 40 milliards de contribution européenne.

Ces sommes pharamineuses se doivent d’être bien employées. France Relance fait "le pari d’une société plus économe en ressources et axée sur la proximité…" Trente des 100 milliards sont consacrés à cet objectif. Concernant le domaine de la construction et de la réhabilitation thermique des bâtiments, l’un des points essentiels du plan, les investissements consentis le sont au service des économies d’énergie mais également au service immédiat du retour à l’activité des professionnels du secteur.

Comme le rappelle Yannick Pache, chef du bureau QC4, en charge de la réhabilitation du parc, au ministère de la Transition écologique, "les chantiers de construction ont connu un quasi coup d’arrêt durant le premier confinement. Le fonds de solidarité et le chômage partiel ont permis de parer au plus pressé. Mais comment rebondir ensuite, après ces arrêts de chantiers ?" D’autant que, dans le même temps, l’activité a diminué, en particulier dans le domaine de la construction d’immeubles destinés au tertiaire.

Le lancement, via le plan, de nouveaux chantiers de rénovation énergétique, participe à la solution des problèmes de l’heure. Le plan va ainsi rehausser le budget du dispositif MaPrimeRénov’ de 2 Md€ durant les années 2021-2022. "Il y a, poursuit Yannick Pache, un triple intérêt à agir, la rénovation elle-même, le respect des objectifs de la Cop 21 et la reprise de l’activité."

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Marc Lemonier

Paroles d’acteur

"France Relance" accélère la rénovation thermique des logements sociaux

Amélie Renaud, adjointe au directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, au sein du ‎ministère de la Transition écologique, revient pour nous sur la mobilisation du plan de relance en faveur de la rénovation thermique des logements sociaux.

© Rénovation énergétique à Fresnes / Arnaud Bouissou - Terra

Le plan France Relance donne la mesure du problème. "Une partie du parc de logement social est aujourd’hui vétuste ou inadapté aux besoins actuels, notamment au regard de ses caractéristiques et des aspirations des demandeurs. En raison de son ancienneté, ce parc présente également de faibles performances thermiques et nécessite des travaux de rénovation thermique indispensables…"
Amélie Renaud rappelle la manière dont le plan s’empare de cette problématique.

Comment le plan France Relance est-il décliné au plus près des territoires dans le domaine de la rénovation thermique des logements sociaux ?

Lors de l’annonce du plan France relance, début septembre 2020, chacun des ministères concernés a déterminé à son niveau les grands équilibres financiers et les thématiques pouvant en être l’objet. Pour ce qui nous concerne, nous avons identifié la rénovation massive de bâtiments en particulier dans le logement privé et le logement social.
En ce qui concerne les logements sociaux plus précisément, l’application de ce cadre national est gérée localement par les préfets et les collectivités délégataires des aides à la pierre qui, sur la base des principes fixés, repèrent les projets répondant aux attentes, et notamment ceux qui seraient prêts à démarrer immédiatement. La rapidité de mise en œuvre est l’un des impératifs du plan de relance. Il doit s’agir de projets déjà avancés, car nous n’avons que deux ans pour monter un dossier, trouver les financements complémentaires et engager leur mise en œuvre…
Durant cette période préalable, il a fallu préciser les modalités de gestion de ces enveloppes, les critères d’éligibilité, le calendrier et les modes d’association des acteurs au niveau local. Ensuite, a débuté une phase de pré-recensement des projets qui pourraient bénéficier du plan. Les services déconcentrés les ont repérés, ce qui nous permettait en retour, d’affiner un peu nos critères d’éligibilité et l’ambition que l’on souhaitait donner à ces actions.

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Propos recueillis par Marc Lemonier

Le point sur…

Les Pays de Loire, laboratoires de la démarche Massi Réno

Les bailleurs sociaux lancent une opération novatrice en direction de leur parc de maisons individuelles.

L’action engagée par les bailleurs sociaux ligériens trouve son origine dans une constatation, rappelée par Axel David, directeur de l’USH des Pays de Loire. "Nous avions des difficultés à rénover des pavillons chauffés à l’électricité, situés dans des zones périurbaines disséminées dans toute la région. Ils furent très longtemps attractifs, car ils offraient aux locataires du parc social la possibilité de vivre dans une maison individuelle." Mais cette perception s’est dégradée devant l’augmentation vertigineuse des charges de chauffage liée à leur vétusté.

Depuis, les bailleurs sociaux de la région Pays de Loire se mobilisent en faveur d’une évolution des pratiques dans la rénovation énergétique de leur patrimoine. En 2018, ils rencontrent des acteurs faisant la promotion de la démarche Energie Sprong, importée des Pays-Bas. Ils en arrivent à se poser des questions sur la possibilité d’engager des campagnes de réhabilitation "industrielle" de logements, avec l’ambition de leur offrir un "bouclier énergétique". Toutefois, la difficulté tient à la nature des logements concernés, comme le souligne Axel David. "Pour engager cette démarche fondée sur la standardisation et l’industrialisation des procédés techniques, il serait évidemment plus simple de procéder à la rénovation énergétique de bâtiments collectifs". Une étude porta sur environ 16 000 logements, les bailleurs ayant choisi des opérations intégrées dans un marché inter-organisme. L’opération concernera finalement 2 000 logements, soit environ 1 % du parc ligérien.

Une opération pilote de rénovation menée selon la démarche EnergieSprong à Longueau (80). © EnergieSprong

Pour Axel David, "le principe d’EnergieSpong est de changer de modèle. Aujourd’hui les travaux sur le parc social se répètent tous les 10 ou 12 ans avec des remises aux normes et de l’entretien. La nouvelle logique consiste à tout remettre à des hauts niveaux de qualité dès le début, pour que le produit s’engage dans un nouveau cycle de vie." Pour cela, il n’est pas possible et rentable de faire des prototypes, la réussite passe par une commande collective et massive. "Nous devions trouver un modèle économique, tout en s’assurant d’avoir des entreprises pour mettre en chantier ces opérations." Les travaux consisteront en l’isolation par l’extérieur des maisons, le traitement de la toiture, la ventilation, et la mise en place d’un dispositif performant d’énergie renouvelable.

Les entreprises de BTP de la région se sont mobilisées. Réunies en club, elles ont constitué des groupes pour se porter candidates. Les 2 000 logements à traiter font l’objet de quatre lots de 500 logements. Une bonne échelle pour que les opérations soient menées par des regroupements comportant 25 % de PME. Les entreprises sélectionnées seront liées par un marché CREM - conception, réalisation, entretien et maintenance - de longue durée, 30 ans.

Cet engagement est l’un des aspects de l’opération dont les conséquences devraient être doublement bénéfiques. Des logements sociaux atypiques connaîtront une nouvelle vie, passant du statut de passoire énergétique à celui de logement BBC, tandis que le monde des entreprises régionales en sera dynamisé.
"L’essentiel de la valeur ajoutée produite par la réhabilitation ne le sera pas sur le site des travaux, précise Axel David, mais auprès d’entreprises parfois distantes. Il faut organiser le travail en usine, ce qui est très différent de la gestion d’un chantier. On déplace la production, et donc aussi les besoins en formation." Au passage, l’opération apparaît comme une motivation pour développer l’usage des BIM (building Information Modeling, les "maquettes numériques") dans le monde des petites entreprises locales.

Financées par les bailleurs sociaux, la Banque des territoires, la Région, des fonds européens, l’État et particulièrement France Relance, les opérations qui vont débuter à la fin de l’année 2021 en Pays de Loire viendront concrétiser les objectifs multiples du plan. Elles ouvrent à de nouvelles possibilités techniques en matière de rénovation énergétique, tout en redynamisant un secteur industriel ayant particulièrement souffert de la crise de la Covid-19.

Marc Lemonier

N° 210

Risques climatiques, le temps d’agir


Plus d’informations sur le blog

En chiffre

6,7 Milliards d’euros

C’est le montant consacré par le plan de relance à la rénovation énergétique des logements privés (2Mds€), des locaux de TPE/PME (200 M€), des bâtiments publics de l’État (4Mds€) et des logements sociaux (500 M€).

Brèves

France Relance soutient aussi l’aménagement durable !

Outre le soutien à la rénovation énergétique, le plan France Relance mobilise 650 M€ en faveur de la construction durable. Dans son émission du 12 janvier, Radio Territoria a présenté et soumis aux questions des auditeurs deux des dispositifs prévus, en donnant la parole à Amélie Renaud (cf Paroles d’acteur) et Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur de l’aménagement durable au ministère de la Transition écologique.
Les aides à la construction durable représenteront 350 M€ sur 2 ans à destination des communes, "pour financer équipements et aménités urbaines d’une ville dense et désirable", résume Jean-Baptiste Butlen. Quant au fonds friches, il consacrera 300 M€ à la reconquête des friches, un enjeu majeur dans la recherche conjointe de sobriété foncière et de revitalisation urbaine. Amélie Renaud précise que ce fonds a pour vocation "d’absorber les surcoûts de ces opérations, difficiles à équilibrer".
De façon plus globale et très utile pour l’ensemble des collectivités, la plateforme "aides-territoires" développée par le ministère regroupe déjà 184 des aides du plan de Relance.
Le podcast de l’émission est disponible sur le site de Radio Territoria.
■ F.C.

Protéger encore et toujours les zones humides

"Marais, tourbières, prairies humides, lagunes, mangroves… entre terre et eau, les milieux humides, comme l’affirme le centre de ressource des milieux humides, présentent de multiples facettes et se caractérisent par une biodiversité exceptionnelle."
Il y a cinquante ans, la convention de Ramsar (du nom de la ville iranienne où elle fut signée) reconnaissait les vertus des zones humides et les raisons de les préserver. Elles concourent en effet à la lutte contre les inondations et les tempêtes en permettant le stockage des eaux excédentaires, elles atténuent les sécheresses, elles favorisent enfin la qualité des eaux en jouant un rôle de stations d’épuration naturelles. Aujourd’hui, la convention de Ramsar reconnaît plus de 2 400 zones humides d’importance internationale dans 171 pays - dont 50 en France. Malheureusement une étude (1) montre que sur les 189 sites évalués, 41 % se sont dégradés et 62 % n’assurent plus les services qu’ils étaient susceptibles de rendre à l’origine.
À l’occasion de la Journée mondiale des zones humides, de ce cinquantième anniversaire et jusqu’à la fin février 2021, partout en France métropolitaine et en outre-mer, de nombreuses structures se sont mobilisées pour proposer un programme varié "pour fêter et faire découvrir les zones humides et leurs bienfaits."
Centre de ressource des milieux humides : http://www.zones-humides.org/

■ M.L.

(1) "L’évolution des zones humides entre 2000 et 2010. Des pressions toujours fortes". Commissariat général au développement durable (CGDD), octobre 2012

Lutter contre la déforestation, en contrôlant les achats

Selon Serge Morand, écologue spécialiste des maladies infectieuses, "les risques d’émergence de maladies infectieuses sont plus élevés dans les régions tropicales à déboisement rapide. Une accélération de la déforestation signifie une hausse des interactions entre la faune sauvage, qui est un réservoir de virus encore inconnus, et les activités humaines, notamment agricoles. (1)" Par ailleurs, les confinements et la crise ont permis une accélération de la déforestation, par des populations allant chercher des ressources de substitution dans les forêts proches et, faute de surveillance, durant cette période particulière.
L’un des remèdes à la déforestation, tel que le définit la Stratégie Nationale contre la Déforestation Importée (SNDI), passe par la surveillance accrue de l’importation de produits issus de cette pratique et leur traçabilité.
En novembre dernier, la secrétaire d’État à la Biodiversité, Bérangère Abba, a présenté une série de mesures de contrôle permettant aux acheteurs, à commencer les acteurs publics, de connaître la provenance de leurs achats. Le ministère souhaite lancer "une politique d’achat public "zéro déforestation" d’ici 2022 ; ainsi, 130 000 acheteurs publics dans les ministères, les services déconcentrés de l’État ou les collectivités territoriales auront accès à un guide de bonnes pratiques."

■ M.L.

Diagoflash

Le "5 à 7" du club Ville et aménagement en webinaire le 24 mars 2021

L’écologie est aussi affaire d’habitat

Une politique écologique de l’habitat s’impose, alors que la production d’un habitat de qualité se heurte souvent à des enjeux dits écologiques de type NIMBY, cela en période de succession de crises. Aggravée par la pandémie, la crise actuelle accentue des inégalités sociales et territoriales aux causes multiples. Il s’agit alors de sortir d’une vision étroite de la production du logement afin d’en faire le fer de lance d’une stratégie urbaine et d’aménagement. Avec Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat et ancienne ministre du logement et Jean-Claude Driant, professeur à l’École d’urbanisme de Paris. Conçu et animé par Ariella Masboungi, architecte-urbaniste, grand prix de l’urbanisme 2016.
www.club-ville-amenagement.org

Vient de paraître

La rénovation performante par étapes

Il s’agit d’un rapport d’expertise rédigé pour le compte de l’ADEME par Dorémi et Enertech et paru en janvier 2021. Il analyse les conditions de réussite nécessaires à la réalisation de rénovations performantes permettant au parc français de maisons individuelles d’atteindre, par étapes, le niveau BBC rénovation ou équivalent à l’horizon 2050. Il indique que les pratiques usuelles, nommées "rénovations partielles", qui consistent à juxtaposer des "gestes de travaux", ne permettent pas d’atteindre cet objectif. L’étude montre la nécessité de disposer d’une vision globale de ce que sera le parcours d’une rénovation performante par étapes. Elle pointe également l’importance majeure du traitement des interfaces entre postes de travaux afin d’atteindre un niveau BBC rénovation ou équivalent à terme à l’échelle du parc.
A retrouver gratuitement sur www.ademe.fr/mediatheque.

Exposition

Sols vivants, socles de la nature en ville
jusqu’au 27 février, à Paris

Écosystèmes de nature en ville, espaces publics bioclimatiques, parcs et quartiers conçus comme des machines hydrauliques, villes forêts, terroirs métropolitains, l’Agence Ter présente huit projets exposés sous forme de tableaux vivants. Élus Grand Prix de l’Urbanisme en 2018, les trois associés, Henri Bava, Michel Hössler et Olivier Philippe, et leurs collaborateurs, présentent cette exposition où le sol vivant est le concept fondateur de la résilience urbaine.
La galerie d’architecture, 11, rue des Blancs-Manteaux, 75004 Paris
www.agenceter.com

Qui sommes-nous?

 

Directrice de publication : Stéphanie Dupuy-Lyon, directrice générale de la DGALN

Rédactrice en chef : Virginie Bathellier

Secrétaire de rédaction : Murielle Morvan

Journalistes : Virginie Bathellier - Florent Chappel - Nathalie Garat - Marc Lemonier

Rubrique Diagoflash : Valérie Blin

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